Read La Bible du crime (NON FICTION) (French Edition) Online
Authors: Stéphane Bourgoin
Découverte d’une nouvelle victime démembrée du « Boucher de Cleveland » qui assassine et mutile quatorze hommes et femmes entre 1934 et 1950.
L
e 8 avril 1938, Steve Morosky, 35 ans, rend visite à un ami qui habite une cabane près de la Cuyahoga River. Il est 14 heures 15, lorsqu’il descend la colline à Superior Avenue pour passer devant une énorme bouche d’égout et repère une masse blanche qu’il prend tout d’abord pour un poisson mort. Mais quand il la retourne avec un bâton, Morosky constate qu’il s’agit de la partie inférieure d’une jambe humaine, amputée au genou et à la cheville. Six longs cheveux blonds, peut-être ceux du meurtrier, adhèrent encore au membre coupé. Cela fait neuf mois que le « Boucher » n’a plus fait parler de lui, du moins à Cleveland. Le serial killer serait-il blond, puisque cela fait deux fois que l’on trouve des cheveux d’une telle couleur près des restes des victimes ?
David Cowles, du Scientific Investigation Bureau, et l’inspecteur Joseph Sweeney sont les premiers sur place, bientôt rejoints par
Orley May et Emil Musil. Les premières constatations leur laissent penser qu’il s’agit d’une femme âgée de 25 à 35 ans qui a été assassinée deux ou trois jours auparavant. Les fouilles suivantes ne permettent pas de retrouver le reste du cadavre.
Malgré la présence du célèbre « Incorruptible » Eliot Ness à la tête de la sûreté de Cleveland à cette époque, le serial killer ne sera jamais identifié. Dans mon ouvrage
Qui a tué le Dahlia Noir ?
, je l’identifie comme ayant commis vingt et un assassinats dont celui d’Elizabeth Short, surnommée le « Dahlia Noir », femme dont le cadavre est découvert coupé en deux le 15 janvier 1947, sur un terrain vague de Los Angeles
2
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Mary Kay Pierce, une barmaid de 32 ans, est assassinée par Richard Speck, à Montmouth, dans l’Illinois.
Q
uelques mois plus tard, Richard Speck devient célèbre en tant que responsable du massacre et du viol de huit infirmières à Chicago, dans la nuit du 13 au 14 juillet 1966. Condamné à la peine de mort, la sentence est commuée en réclusion criminelle à perpétuité. Speck décède en prison à l’âge de 49 ans, le 5 décembre 1991.
En juillet 1968, un article en trois parties du
New York Times
révèle une étude qui prétend démontrer qu’un nombre élevé de criminels violents possède un chromosome XYY. Richard Speck serait l’un de ces individus alors qu’une analyse d’août 1966, gardée secrète, indique qu’il a en réalité un chromosome XY. Malgré plusieurs démentis de scientifiques, publiés en 1972, cette erreur concernant le défaut génétique de Richard Speck persiste encore à notre époque dans de nombreuses publications.
L’escroc et tueur en série Georges Sarret est guillotiné en place publique. Son cas fait l’objet d’un film célèbre de Francis Girod,
Le Trio infernal
(1974), avec Michel Piccoli et Romy Schneider.
«
C
e n’est rien de tuer quelqu’un. Le plus difficile, c’est de faire disparaître le cadavre », expliquait un commissaire de police au moment de l’affaire du « Trio infernal » d’Aix-en-Provence. Né Georges-Alexandre Sarrejani, le 23 septembre 1878 à Trieste, et plus connu sous le nom de Georges Sarret, ce criminel a innové en détruisant méthodiquement et scientifiquement les cadavres. Des crimes parfaits, ou plutôt presque parfaits, puisqu’il est jugé en octobre 1933 par la cour d’Aix-en-Provence.
À l’adolescence, Sarret s’installe en France où, après de brillantes études de droit, il devient un avocat d’affaires réputé du barreau de Marseille. Marié, père de famille, Georges Sarret a toute l’apparence du bourgeois respectable, mais l’avocat mène une existence dissolue faite de soirées festives, de maîtresses et d’alcool. Ayant séduit deux sœurs allemandes, Philomène et Catherine Schmidt, il les installe au début des années 1920 dans la villa L’Ermitage qu’il loue près d’Aix-en-Provence. Mais bientôt cette double vie oblige Sarret à se lancer dans des escroqueries à l’assurance-vie. Escroc habile, il fait participer ses maîtresses à son plan ingénieux. Elles épousent des hommes âgés à la santé fragile, puis un complice en parfaite santé, un ex-abbé défroqué Chambon-Duverger, passe, sous le pseudonyme de Deltheil, une visite médicale pour souscrire une assurance-vie au nom de l’époux grabataire. Ensuite, il suffit d’attendre le décès du mari, voire de précipiter sa mort avec du gaz ou du poison. Et le tour est joué.
Cent mille francs tombent dans l’escarcelle des deux hommes et des deux femmes. Mais la convoitise de Chambon-Duverger est insatiable, il exige la totalité des cent mille francs pour prix
de son silence. Georges Sarret est obligé de lui verser la somme, mais l’ex-abbé continue son chantage. Le 20 août 1925, Sarret le tue d’un coup de fusil dans la villa l’Ermitage. Il y invite la compagne de la victime, Noémie Ballandreaux. Coup de pistolet. Seconde victime. Georges Sarret est débarrassé du maître chanteur et de sa femme qui aurait pu être gênante. Par ailleurs, il récupère son argent. Maintenant, il doit effacer les traces de son double assassinat.
Sarret retourne à Marseille où il achète quatre bonbonnes d’acide sulfurique de vingt-cinq litres chacune. Durant deux jours, il laisse les cadavres dans la salle à manger. Apparemment, il escompte qu’un début de décomposition facilite l’action du corrosif. Puis il se livre à l’affreuse opération. Il prépare la baignoire qu’il place dans la salle à manger. Il en retire le tuyau d’évacuation, pour empêcher la fuite du liquide, puis installe au fond une plaque de verre qu’il
scelle à la chaux. L’acide sulfurique n’attaque pas le verre. Ensuite, il met les deux cadavres dans la baignoire, celui de Chambon en dessous. Les deux corps sont tout habillés. Sarret prend seulement la précaution de retirer à Chambon-Duverger sa montre en or, qu’il garde. Il verse ensuite le liquide avec précaution. En effet, une goutte qui s’échappe peut causer une terrible brûlure. Une bonbonne à demi versée sur les cadavres commence l’œuvre.
Quelques heures plus tard, il verse la fin du contenu de la deuxième bonbonne et entame la troisième. Ses deux complices, Catherine et Philomène Schmidt l’assistent. Philomène, à l’instruction, racontera que Sarret, inlassablement, revient auprès de la baignoire pour observer l’affreux mélange. Les deux corps arrosés commencent à se corroder. Mais cette corrosion n’est encore que superficielle. Les yeux de l’homme sont attaqués en premier. Ils ont fondu. La peau du visage se noircit. L’étoffe des vêtements s’effiloche par lambeaux. Quand le niveau du liquide monte, on a l’impression que les deux cadavres se tassent et diminuent de volume – qu’ils s’entremêlent.
Sarret suit les progrès de cette lente décomposition. Elle dure trois jours. Chaque soir, avant de se coucher au premier étage, à quelques mètres seulement de ces deux cadavres marinant dans l’acide, il ajoute un peu plus de liquide. Le lendemain, à l’aube, il se penche sur la baignoire, les narines bouchées d’un tampon. Et il voit s’effacer les formes. Rien ne subsiste plus qui rappelle des êtres humains. Avec un bâton, Sarret remue cette fange gélatineuse. Une odeur épouvantable assaille les narines. Les deux femmes mettent la main à la pâte. Avec des seaux, elles puisent la masse noirâtre. « Ne les remplissez pas complètement ! » recommande Sarret aux deux femmes.
Elles lui obéissent. Il ajoute de l’eau dans les récipients, reprend son bâton et remue ce nouveau mélange jusqu’à ce qu’il devienne presque liquide.
Les femmes vont vider les seaux dans les toilettes et le résidu dans des buissons au fond du jardin. Ainsi se volatilisent les deux cadavres.
Quelques années plus tard, lors d’une réunion de famille à Versailles, Sarret fait ingurgiter à son ex-beau-frère du phosphure de zinc. L’autopsie montre qu’il a été empoisonné mais le meurtrier, un temps soupçonné par la police, s’en sort à cause de son excellente réputation. Gestionnaire des six cent mille francs de la fortune de sa victime, Sarret en devient maintenant le propriétaire par héritage. En 1931, les dépenses somptueuses du trio obligent Sarret à mettre sur pied une nouvelle escroquerie à l’assurance-vie. C’est Catherine qui est chargée de souscrire des polices auprès de cinq compagnies différentes. La bénéficiaire est Rose Schmidt, la mère de Catherine et Philomène. Ensuite, Sarret charge l’une des sœurs de trouver une jeune malade en fin de vie. Le choix se porte sur Magali Herbin qui souffre de tuberculose. Magali s’installe bientôt dans la villa Graziella mais elle tarde à mourir et Sarret, qui est à court d’argent, décide d’accélérer le processus en l’empoisonnant elle aussi avec du phosphure de zinc. Le certificat de décès est établi par un médecin qui conclut à une mort naturelle de Magali sous l’identité de Catherine Schmidt. Il faut à présent que Philomène se grime pour jouer le rôle de sa propre mère auprès des différentes compagnies d’assurances pour toucher l’argent. Lourdement maquillée, le visage caché par une voilette de deuil, Philomène se montre une piètre actrice. Deux courtiers remarquent ses mains qui n’ont rien de celles d’une vieille dame et ils soupçonnent une substitution d’identité. Ils contactent d’autres compagnies qui, pour trois d’entre elles, ont déjà reçu la visite de la fausse Rose Schmidt. Une filature permet de découvrir la supercherie. Philomène est arrêtée et inculpée d’escroquerie, mais elle ne dit mot sur les différents meurtres. Perdue sans le patronage de sa sœur aînée, Catherine Schmidt se rend à la police pour avouer tous les crimes commis par le « trio infernal ». Philomène craque à son tour et Georges Sarret est arrêté.
Lors du procès d’octobre 1933, Sarret tente en vain de faire endosser aux deux sœurs la responsabilité des assassinats de Chambon et de Noémie Ballandraux. Catherine et Philomène sont condamnées à dix années d’emprisonnement et, au bout de quatre heures de délibération, Georges Sarret est condamné à la peine de mort. Le 10 avril 1934, à 5 heures du matin, Sarret monte
sur l’échafaud pour avoir la tête tranchée. Lorsque le procureur de la République pénètre dans sa cellule pour lui annoncer le rejet de son pourvoi, l’accusé se contente d’un laconique : « Je suis la victime d’une injustice. » Ce sera la dernière exécution à se dérouler dans la ville de Marseille.
Exécution de la tueuse en série Louise Peete.
E
ntre 1910 et 1944, cette prostituée assassine plusieurs maris ou compagnons, ainsi que d’autres personnes pour qui elle travaille. En outre, cette « femme fatale » au visage ingrat et au cœur de pierre, cause le suicide de deux de ses amants. Louise Peete est exécutée dans la chambre à gaz de San Quentin, le 11 avril 1947.
Arrestation de Landru.
N
é en 1869, à Paris, d’un père chauffeur dans une fonderie et d’une mère couturière, Landru a une enfance sans histoire. Aimé par ses parents, il est un enfant choyé et désiré (c’est d’ailleurs son deuxième prénom). Il est éduqué chez les frères, mais il doit interrompre ses études faute de moyens financiers. Du coup, il entre dans un cabinet d’architecte. Il épouse sa cousine Marie-Catherine Remy car elle se retrouve enceinte de lui. Quatre enfants naissent de cette union. Pour subvenir aux besoins de la famille, Henri-Désiré vend des objets d’occasion, des jouets, des véhicules ou des meubles.
C’est à la même époque que Landru devient un escroc et il est condamné à sept reprises entre 1900 et 1912. En 1909, il passe pour la première fois une annonce de rencontre et il soutire une
forte somme à une certaine M
me
Izoret qui porte plainte. En 1914, il est à nouveau condamné à quatre années de prison pour escroquerie, mais il prend la fuite.
En décembre 1914, Landru loue une villa à Vernouillet, puis devient locataire de la villa Ermitage à Gambais en décembre 1915. Pendant les quatre années qui suivent, onze personnes vont disparaître, toutes rencontrées par le biais d’annonces. Pour sept annonces déposées, il obtient environ trois cents réponses. Dans un carnet, Landru note avec soin la situation financière de chacune de ces femmes.
Malgré un physique ingrat, Landru plaît aux femmes. Il parvient à les séduire, leur fait signer des procurations, les emmène dans sa villa de Gambais où elles disparaissent. Pour s’y rendre, il achète un billet aller-retour pour lui et un aller simple pour chacune de ses futures victimes.
Bientôt des proches des disparues commencent à s’inquiéter et portent plainte. C’est le célèbre inspecteur Belin qui est chargé d’enquêter. Il se rend à Gambais où des voisins de la villa Ermitage lui indiquent que le locataire n’ouvre jamais les volets et qu’il fait souvent du feu, même en plein été. La fumée qui s’échappe de la cheminée sent très mauvais. Le policier, lui, pense que toutes ces femmes sont tombées entre les mains d’un proxénète qui les envoie travailler dans des maisons closes à l’étranger.
Grâce à une rencontre fortuite, Landru est reconnu par l’amie d’une de ses victimes et on découvre son adresse parisienne, au 76 rue Rochechouart. Il est arrêté le 12 avril 1919. Pendant qu’on le transfère dans les bureaux du commissariat, Landru tente de se débarrasser d’un petit carnet, qui est récupéré par un policier. Landru y a noté toutes ses rencontres, ses dépenses et l’achat de nombreuses scies à métaux. La perquisition dans la villa de Gambais permet de découvrir un matelas taché de sang, une cuisinière avec des fragments d’os. Dans le hangar, ce sont d’autres ossements et des cheveux qui sont mis au jour.
Le procès s’ouvre à Versailles le 7 novembre 1921. Vingt-trois jours plus tard, Henri-Désiré Landru est condamné à la peine capitale. Il est guillotiné le 25 février 1922 par le bourreau Anatole Deibler qui note dans son carnet : « 6 heures 10. Temps clair. » Lorsqu’on lui propose une dernière cigarette et un verre de rhum, il refuse et déclare : « Ce n’est pas bon pour la santé. »